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Le réseau de transport s’adapte pour accompagner la transition énergétique


Publié le 04 Novembre 2019



RTE a présenté le 17 septembre 2019 son projet d’évolution du réseau électrique à l’horizon 2035, appelé « Schéma décennal de développement du réseau ». Ce plan décennal  vise à rénover le réseau, à l’adapter aux orientations de la future Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) et à l’évolution des mix énergétiques des pays voisins, tout en s’appuyant au maximum sur les lignes existantes. Les investissements associés nécessitent 33 milliards d’euros sur 15 ans, dont 2,9 milliards pour la modernisation de son ossature numérique. Le plan décennal souligne l’importance des solutions de flexibilité (smart grids) dont le développement « se pose désormais comme une alternative aux infrastructures classiques de production et de réseau »

lignes haute tension – crédits EDF

 

Conformément aux dispositions prévues par la loi, RTE a la responsabilité d’élaborer un plan décennal de développement du réseau. Ce schéma décennal, établi en concertation avec l’ensemble des acteurs du secteur est soumis au ministre de la Transition écologique et solidaire, à la Commission de régulation de l’énergie et à l’Autorité environnementale.

 

Le « Schéma décennal de développement du réseau » (SDDR) proposé par RTE permettra de rénover le réseau et de l’adapter aux orientations de la future Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) et à l’évolution des mix énergétiques des pays voisins, tout en s’appuyant au maximum sur les lignes existantes.

 

Au total, RTE prévoit d’investir sur fonds propres 33 milliards d’euros d’ici à 2035, soit environ 2 milliards d’euros par an dans la prochaine décennie contre 1,3 milliard  aujourd’hui.

 

Le SDDR identifie cinq volets industriels « permettant d’atteindre les objectifs de transformation du mix électrique tout en maintenant la qualité du service actuelle » :

  • entamer le premier renouvellement du réseau depuis sa création : huit milliards d’euros sont ainsi prévus afin de renouveler les ouvrages les plus anciens
  • adapter le réseau au nouveau mix : le SDDR prévoit 13 milliards afin de prendre en compte le nouveau mix électrique issu de la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE), soit en augmentant la capacité de lignes actuelles, la construction de nouveaux liens, voire l’enlèvement de lignes.
  • poursuivre et adapter aux nouvelles technologies l’ossature numérique du réseau : 2,9 milliards d’euros sont prévus pour « renforcer les exigences de cybersécurité, pousser plus loin l’utilisation de l’infrastructure actuelle et réduire le besoin de nouvelles lignes ».
  • doubler en 15 ans la capacité d’interconnexion de la France (3 milliards d’euros)
  • construire un réseau de raccordement des énergies marines, c’est-à-dire un réseau marin planifié de manière cohérente et efficace avec les capacités d’accueil à terre et le potentiel de développement en mer, de manière à en limiter les coûts (7 milliards d’euros).

 

Au-delà des cinq volets industriels, le SDDR consacre de longs développements aux solutions flexibles, aux enjeux de localisation des énergies renouvelables ainsi qu’au développement de l’autoconsommation.

 

Une ossature numérique à renforcer pour garantir, à chaque instant, la sûreté et la performance du réseau électrique

 

Le projet de SDDR consacre un chapitre détaillé aux systèmes d’information : « le système nerveux qui garantit l’observabilité, la commandabilité et la protégeabilité du réseau électrique ».

« Aujourd’hui, rappelle le SDDR, les centres de conduite du réseau (dispatching) s’appuient sur une représentation de l’état du système électrique grâce au traitement de plus de 40 000 télémesures relevées toutes les 10 secondes et de plus de 350 000 télésignalisations relevées à chaque changement d’état des matériels (par exemple : disjoncteur ouvert ou fermé) ».

Le réseau électrique sera, dans les prochaines décennies, soumis à deux phénomènes qui transformeront en profondeur ses modes d’exploitation et de maintenance : l’essor des énergies renouvelables électriques variables (éolien et solaire) et le vieillissement du réseau électrique : « le réseau développé massivement après la seconde guerre atteindra, dès 2030, un niveau d’obsolescence avancée. La connaissance fine de la dégradation subie par chacun des matériels est indispensable pour orienter les opérations d’entretien et de renouvellement vers les composants les plus critiques pour le système électrique ».

 

Afin de répondre à ces transformations du système électrique, RTE prévoit de renforcer l’« ossature numérique » de son réseau selon un déploiement par paquet fonctionnel cohérent :

  • « Le paquet 0 « renouvellement » pour répondre au vieillissement naturel des systèmes de contrôle-commande existants, installés dans les postes depuis les années 1970.
  • Le paquet 1 « fondamental » pour étendre l’infrastructure privée télécom afin de garantir l’observabilité et la conduite du réseau en cas de blackout électrique, et assurer in fine la sûreté et la sécurité des biens et des personnes.
  • Le paquet 2 « performance » pour maintenir la performance du réseau électrique actuel, en minimisant l’impact des défauts sur la coupure de consommation et mieux maîtriser les investissements d’adaptation et de renouvellement via un dimensionnement optimal du réseau en intégrant des écrêtements sur la production décentralisée ».

 

Le renouvellement des dispositifs obsolescents (paquet 0) représente ainsi un montant de 1,5 Md€ d’ici 2030. Les paquets 1 et 2, qui conduiraient à relier via un lien de télécommunication près de 1700 sites de RTE (contre 1100 aujourd’hui) pour compléter le dispositif vital de sûreté du système électrique et pour maintenir la performance technique et économique du réseau, représentent 1,4 Md€ sur la période 2021-2035.

« Le SDDR n’intègre donc que le « socle numérique minimal » (paquet 0 + 1 + 2) dans la trajectoire de référence : le paquet 3 n’y figure pas mais pourrait être mis en œuvre selon la temporalité des phénomènes de la transition énergétique. Cette stratégie anticipe également, de par son architecture, la possibilité à terme d’activer de nouveaux services, en particulier par le biais de technologies décentralisées comme la blockchain ».

 

Les solutions de flexibilité peuvent réduire modérément les besoins d’investissement dans le réseau de transport

 

S’appuyant sur une série d’études menées par RTE[1] et par la CRE[2], le SDDR s’attache à évaluer l’apport des solutions de flexibilité et des smart grids à l’évolution du réseau électrique.

« Depuis quelques années, ces solutions de flexibilité sont présentées comme des alternatives possibles aux infrastructures classiques de production et de réseau, celles-ci faisant parfois face à des problématiques d’acceptabilité. Elles pourraient également accompagner le développement des énergies renouvelables variables, susceptible d’entraîner une augmentation des besoins de flexibilité du système électrique.

Dans ce contexte, les gestionnaires de réseau, les pouvoirs publics et l’ensemble des parties prenantes du secteur, en s’appuyant sur les résultats d’études prospectives sur la valeur des flexibilités, expérimentent depuis plusieurs années l’utilisation de solutions flexibles au service du système électrique par le biais de nombreux démonstrateurs (Smart Grid Vendée, GreenLys, Nice Grid, VENTEEA, Solenn…), ainsi que de quelques déploiements à grande échelle (Smile, Flexgrid, You & Grid).

 

Quelques gigawatts à l’horizon 2030

 

  • « Les études menées par RTE sur les réseaux électriques intelligents ont permis de mettre en évidence quelques résultats principaux sur la valeur de ces solutions pour le système électrique : les solutions smart grids peuvent présenter un intérêt économique à l’échelle du système, pour un gisement de quelques gigawatts à l’horizon 2030 ; la majeure partie de la valeur apportée par ces solutions provient de la participation à l’équilibre offre-demande et aux différents mécanismes de marché de l’électricité (capacité, énergie, équilibrage) ; les solutions de flexibilité, indépendamment de leur niveau de raccordement, peuvent réduire modérément les besoins d’investissement dans le réseau de transport en permettant de limiter les congestions sur le réseau électrique, voire différer ou éviter certains investissements dans les infrastructures.
  • Toutefois, sauf pour quelques configurations spécifiques, la valeur apportée par ces solutions pour le réseau de transport est le plus souvent de second ordre par rapport aux gains pour l’équilibre offre-demande. Ces études ont également contribué à la construction d’un cadre d’analyse permettant à RTE d’intégrer plus systématiquement les smart grids dans le bouquet de solutions étudiées pour l’adaptation du réseau.
  • Ainsi, depuis quelques années, RTE étudie systématiquement l’intégration des solutions flexibles tierces matures en alternative des solutions structurantes.

 

  • À ce jour, RTE déploie largement les solutions d’automates d’écrêtement de production renouvelable et continue d’expérimenter certaines solutions techniques, notamment le stockage d’électricité par batterie, afin de préparer l’exploitation du système électrique à un déploiement à grande échelle de ce type de technologie ».

 

La mise en œuvre de ce plan décennal devrait permettre de réduire les émissions de CO2 du système électrique européen de l’ordre de 5 à 10 millions de tonnes équivalent carbone, soit autant que les émissions actuelles des centrales au charbon françaises.

 

 

Sources :

RTE : Développement du réseau électrique français à l’horizon 2035 : Un réseau rénové et repensé pour réussir la transition énergétique

Chapitre 4 du SSDR :  l’ossature numérique : des dispositifs à renforcer afin de garantir, à chaque instant, la sûreté et la performance du réseau électrique

Chapitre 9  du SSDR :  les solutions flexibles : en complément des stratégies structurelles, de nouveaux acteurs fournissent des services pour le réseau

 

 

[1] RTE, 2015, Valorisation socio-économique des réseaux électriques intelligents – Méthodologie et premiers résultats RTE, 2017, Réseaux électriques Intelligents – Valeur économique, environnementale et déploiement d’ensemble

[2] CRE, 2016, Étude sur la valeur des flexibilités pour la gestion et le dimensionnement des réseaux de distribution Enedis, ADEeF, 2017, Valorisation économique des Smart Grids – Contribution des gestionnaires de réseau public de distribution CRE, 2017, Étude sur les mécanismes de valorisation des flexibilités pour la gestion et le dimensionnement des réseaux publics de distribution d’électricité