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Les micro-réseaux, une solution à l’électrification des zones isolées ?


Publié le 05 Novembre 2020



Vendredi 30 octobre, Think Smartgrids a organisé un webinaire sur les micro-réseaux (ou « microgrids ») et les enjeux de leur réplicabilité, en partenariat avec la Commission de Régulation de l’Energie (CRE) et le Réseau des régulateurs francophones de l’énergie, RegulaE.Fr. L’occasion de faire le point sur les projets récemment déployés, en vue de répondre à la demande croissante d’accès à l’énergie pour des territoires ou des bâtiments isolés, tout en offrant des solutions abordables et bas carbone. Les technologies « smart grids » employées pour le fonctionnement de ces micro-réseaux permettent en outre davantage de sécurité, de résilience énergétique, ainsi qu’une réduction des pertes électriques.

 

 

Cet évènement, introduit par Valérie-Anne Lencznar, DG de Think Smartgrids, et animé par Thomas Bazin, Strategic Account Executive de Schneider electric et président de la Commission internationale de l’association, a ainsi présenté différents retours d’expérience et donné les principales clés de réussite d’un projet de micro-réseau.

Catherine Edwige, Commissaire à la Commission de Régulation de l’Energie (CRE) et Présidente de RegulaE.Fr, a introduit le webinaire en présentant les actions de la CRE française concernant ces micro-réseaux. Cette dernière a notamment le rôle de définir les tarifs réglementés de vente d’électricité pour les consommateurs de micro-réseaux, de calculer les charges de service public de l’énergie ou encore d’évaluer le niveau de compensation des unités de production d’électricité. Mme Edwige a ensuite présenté plusieurs modèles de micro-réseaux fonctionnant avec 100% d’énergie renouvelable, sur l’île de Sein, l’île de la Réunion et en Guyane, en insistant sur l’importance dans de tels projets d’accompagner le consommateur et de conduire des campagnes de maitrise de la demande d’énergie.

Sur le continent africain, où près de la moitié de la population était toujours privée d’électricité en 2017, le développement des micro-réseaux est un enjeu de taille pour offrir un accès universel à l’énergie. L’extension des réseaux nationaux aux territoires isolés est souvent inenvisageable en raison de son coût, et les micro-réseaux peuvent en outre apporter des solutions aux sites industriels isolés, ainsi qu’aux bâtiments publics (hôpitaux, écoles…) dans les zones périurbaines où l’accès au réseau central est limité. Claude Gbêdonougbo GBAGUIDI, Président de l’Autorité de Régulation de l’Electricité (ARE) du Bénin et 1er Vice-Président de RegulaE.Fr, a ainsi présenté le contexte et le cadre réglementaire des micro-réseaux au Bénin. Il a souligné l’environnement propice à l’électrification hors réseau dans le pays grâce à des lois favorables garantissant notamment des subventions. 66 mini-réseaux ont déjà été construits et devraient bientôt faire l’objet d’un appel d’offres pour une exploitation durable par des opérateurs privés.

Toujours au Bénin, Blue Solutions, filiale du groupe Bolloré, a ainsi déployé 12 mini-réseaux solaires couplés à des solutions de stockage innovant, au sein d’un consortium qui regroupe Générale du Solaire et ARESS (opérateur énergétique béninois). Pour Antonia Orsoni, responsable du portefeuille de projets stationnaires hors réseau de Blue Solutions, la réussite d’un projet de micro-réseau nécessite notamment d’adapter les solutions techniques au contexte et à l’environnement dans lequel il sera déployé. Une des forces de Blue Solutions est sa batterie tout solide, qui lui permet de répondre aux contraintes d’un site complexe et isolé tout en garantissant de meilleures performances environnementales, sans climatisation, sans solvant organique ni terres rares, avec une haute recyclabilité et une grande robustesse, notamment face aux températures élevées.

Dans l’état du Para au Brésil, c’est un projet de minicentrales photovoltaïques qui a été porté par Omexom, dans le cadre du programme fédéral d’accès à l’énergie pour les sites isolés d’Amazonie « Luz para Todos ». Ce sont 1408 minicentrales hors réseau qui ont ainsi été déployées sur des sites avec de fortes contraintes logistiques et environnementales, comprenant des panneaux solaires d’une puissance de 1.3 kWc et des batteries de 6 kWh garantissant 2 jours d’autonomie. Anoucheh Bellefleur, Cheffe de projet Market Development chez Omexom, a insisté sur l’importance de l’optimisation des coûts pour garantir l’accessibilité de tels projets et a rappelé qu’une des forces du travail d’Omexom sur place était d’avoir su recourir à des équipes brésiliennes locales (plus de 80% d’emplois locaux dans le projet), familières avec cet environnement. Les micro-réseaux nécessitent en effet de s’appuyer sur des partenariats locaux fiables dans la durée.

Enfin, Bruno Prestat, directeur de la R&D chez EDF, a évoqué le démonstrateur microgrid innovant MASERA (Microgrid for Affordable and Sustainable Electricity in Remote Areas) déployé sur l’île de Semakau, et initié dans le cadre d’un partenariat entre Enedis et l’Université technologique de Nanyang (NTU) de Singapour. Ce démonstrateur, qui permet de fournir une énergie électrique décarbonée avec 100 kilowatts de capacité de production, est opérationnel depuis deux ans et fonctionne de manière autonome. EDF vise ainsi à déployer des micro-réseaux performants, à bas coût et durables pour des zones rurales et isolés d’Asie du Sud-Est. Un des objectifs ambitieux de l’électricien est en effet de proposer une électricité 100% EnR, sans coupures (ou « blackouts »),  à un prix équivalent ou inférieur à celui des prix constatés sur les marchés locaux. Les retours d’expérience du projet sont déjà très instructifs et selon Bruno Prestat, EDF veut maintenant rapidement passer à la commercialisation des différentes solutions, qui est l’objectif principal de ce démonstrateur à grande échelle.

Think Smartgrids est engagée depuis plusieurs années sur la thématique des micro-réseaux, notamment à travers son partenariat avec la NTU de Singapour qui a contribué à la naissance du projet MASERA. Les micro-réseaux sont une solution essentielle pour permettre un accès universel et décarboné à l’énergie, et la filière française des smart grids a déjà de nombreux cas d’usage réussis à son actif.