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Les SmartGrids et l'Internet des Objets


Publié le 17 Juillet 2017



Nous assistons depuis plusieurs années à la mise en réseau croissante d’objets en tout genre qui n’avaient auparavant pas pour coutume de communiquer. Ces objets nouvellement connectés forment ensemble l’Internet des Objets, ou Internet of Things en anglais (IoT). La dynamique s’inspire de l’avènement du réseau des réseaux, l’Internet, qui a en une décennie à peine a relié la quasi-totalité des ordinateurs de la planète, et plus récemment, nos téléphones mobiles. L’IoT confère, à tout objet qu’il connecte, de nouvelles fonctionnalités : surveillance et contrôle à distance pour les plus basiques, analyse prédictive et approches collaboratives pour les plus complexes. La mouvance touche aussi bien le secteur résidentiel, qu’industriel, logistique et même énergétique. C’est à ce dernier plus précisément que nous nous intéresserons au travers de ce dossier.

Thermostat de la jeune pousse française Qivivo – Crédit photo : Qivivo

Table des matières


La rencontre de l’Internet des Objets et des Smart Grids

Concept et portée de l’IoT dans l’énergie

L’IoT s’appuie sur la mise en place d’une multitude de nouveaux capteurs, d’actionneurs et de systèmes intelligents qui communiquent entre eux. L’essor de l’Internet des Objets se situe au croisement de trois évolutions techno-industrielles :

  • La pénétration record des smartphones, ces nouvelles télécommandes universelles, et l’émergence des services cloud ;
  • La baisse spectaculaire des coûts de production des capteurs et actionneurs ;
  • L’émergence de nouveaux réseaux de communication longues distances et basse consommation ;

Le secteur de l’énergie explore aujourd’hui les possibilités offertes par l’Internet des Objets. Mais pour ce secteur, l’intelligence des réseaux n’est pas un phénomène totalement nouveau. Les réseaux électriques disposent déjà de capacités de récupération d’information pour leur surveillance et leur pilotage, mais celles-ci restent encore limitées.

La rencontre de l’IoT et des Smart Grids ouvre la voie à une collecte de données en tous points du réseau et en temps réel. Certaines données auparavant relevées de manière agrégée sur de grandes zones géographiques, pourraient désormais être collectées à une échelle plus locale, près des points de production ou d’acheminement, et à un coût raisonnable. C’est aussi l’accumulation massive de ces données et leur traitement qui est aujourd’hui possible. Une relève toutes les heures des 38 millions de compteurs Linky génère plus de 300 milliards de mesures chaque année. Mettre à profit de tels volumes n’était pas possible avec les technologies disponibles ne serait-ce que 10 ans plus tôt.

L’instrumentation de chaque maillon du réseau de distribution est concernée :

  • Optimisation de la production : pour piloter une installation de production et en améliorer la performance, surtout s’il s’agit d’une source renouvelable,
  • Supervision des réseaux : détection, localisation et réparation à distance d’une panne,
  • Comptage des consommations : pour facturer au plus juste ou optimiser,
  • Maîtrise de la demande : pour accroître la flexibilité des réseaux,
  • Optimisation de la consommation : grâce aux économies d’énergies permises par les systèmes intelligents,
  • Optimisation du recours au stockage : pour maximiser sa durée de vie, son autonomie et son utilisation,
  • Et autres..

Un champs d’éolienne – Crédit Photo : Unsplash en CC

Une priorité pour les fournisseurs de services dans l’énergie

Selon une enquête réalisée auprès de 221 dirigeants de fournisseurs de services dans le domaine de l’énergie, l’Internet des Objets pourrait améliorer significativement l’efficacité de leurs opérations ainsi que la gestion de leurs actifs (asset management). Le principal défi réside, selon eux, dans l’intégration des systèmes d’information existant et l’Internet des Objets. Cette dernière est jugée « importante » par 35% d’entre eux et « très ou extrêmement importante » par 45% d’entre eux, soit 80% d’avis favorables.

Parmi les bénéfices attendus de cette intégration, ils citent par ordre d’importance :

  1. L’amélioration de la planification à long terme,
  2. La meilleure visibilité au sein de l’organisation,
  3. La prévention des risques en matière de sécurité et une optimisation de la gestion des pannes.

Sans capteurs, pas de Smart Grids.

Pour rendre un réseau électrique intelligent, il est nécessaire de déployer, en marge de l’infrastructure électrique, une technologie de mesure précise. Selon Thierry Dagron, vice-président de la société Neology, « Traits d’union entre le monde physique et les systèmes intelligents, les capteurs de mesure des paramètres électriques : courant, tension, déphasage et fréquence, ont un véritable rôle à jouer ». Les données générées par ces derniers pourront ensuite être analysées, traitées, triées et distribuées, au bénéfice de la gestion des réseaux électriques.

Le dirigeant de la jeune société insiste,« La mesure est primordiale » car « les données de supervision doivent pouvoir être produites et remontées en quasi-temps réel pour garantir la continuité et la qualité de service ». Et ce besoin se fait de plus en plus sentir car « l’équilibrage de l’offre et de la demande électrique n’a jamais constitué un tel défi qu’avec l’arrivée de nouvelles venues comme les énergies de sources renouvelables et les infrastructures de recharge des véhicules électrique »s. Pour M. Dagro, le capteur idéal est un capteur « non intrusif, peu encombrant, ne nécessitant, ni maintenance, ni recalibrage, programmable à distance, et présentant une faible dissipation de chaleur ».

Au-delà des capteurs traditionnels de l’énergie, comme les capteurs de tension ou de courant, « un autre ensemble de capteurs permettent de mesurer d’autres grandeurs physiques comme la température, la pression, la qualité d’air, la présence ou l’absence d’une personne ou d’un véhicule à un endroit donné » ont également leur lot d’innovation à apporter. Grâce à eux, il est possible d’obtenir « une information complémentaire permettant d’optimiser la consommation énergétique.” Par exemple, “un capteur de présence dans une salle pourrait permettre de couper le chauffage ou la lumière si personne n’est présent, réduisant ainsi la consommation ».

Pour que les capteurs intelligents (connectés à l’Internet des Objets) deviennent une réalité, leur exploitation doit être rentable. Une fois installé et activé, un capteur doit fonctionner le plus longtemps possible en maximisant l’intervalle entre deux interventions de maintenance afin d’abaisser les coûts. Leurs matériaux et composants doivent être durables et leurs circuits internes doivent afficher une consommation de courant aussi basse que possible et fonctionner plus longtemps en recevant de la part de la batterie une quantité d’énergie donnée.

Une nouvelle génération de réseaux conciliant longue portée et basse consommation

L’essor de l’Internet des Objets tend à réhabiliter les technologies « sans fil » : il exige que les capteurs consomment le moins possible et garantissent une fiabilité similaire à celle d’un réseau câblé.

Plusieurs familles de réseaux sont capables d’acheminer les données transmises mais avec des niveaux de performance très différenciés. Les réseaux Wifi, comme les réseaux GSM (2,3,4 G) sont des supports dont les performances en émission-réception ont largement été éprouvées. Mais ils ne fonctionnent qu’en maintenant une communication plus ou moins constante entre le réseau et les terminaux et sont de ce fait peu économes sur le volet énergie. Ils semblent plutôt adaptés aux objets alimentés à une source d’énergie permanente : ordinateurs, box internet, téléphones mobiles, … En outre, la portée du Wifi reste faible, ce qui limite le champ d’utilisation aux objets fixes. Les réseaux GSM savent intégrer la mobilité mais induisent aussi une consommation de cartes électroniques plutôt coûteuse dans certains contextes.

Les acteurs de l’Internet des Objets pourraient privilégier l’utilisation de bandes de fréquence de plus longue portée, mais de plus faible capacité de transmission. C’est l’option retenue par la société Sigfox. Créée en 2009, Sigfox a développé une technologie à bas coûts, s’appuyant sur la technologie dite d’ultra narrow band (UNB) et une fréquence aujourd’hui non soumise à licence qui était autrefois utilisée pour la transmission des signaux en morse. Avec cette technologie, quelques milliers d’antennes suffisent pour couvrir la France, là où un réseau GSM doit en compter cinquante ou cent fois plus, si bien que la portée de chaque station peut atteindre en moyenne 30 à 40 km, et jusqu’à 400 km (ce qui permet même d’atteindre un satellite).

Mais la société n’est pas la seule à disposer d’une technologie aux caractéristiques adaptées aux besoins de l’Internet des Objets. L’Alliance Lora a conçu le protocole LoraWan avec lequel elle envisage de concurrencer la technologie utilisée par SigFox. LoraWan dispose de caractéristiques similaires à l’UNB mais avec des débits supérieurs et un mode bidirectionnel. Seul inconvénient, son réseau est encore moins développé que celui de son concurrent, qui dispose d’une avance certaine sur le sujet et d’un écosystème d’acteurs déjà en place.

Cloud, architectures M2M et Big Data pour tirer le meilleur parti des données

La multiplication d’objets connectés hétérogènes nécessite une puissance de calcul de plus en plus importante pour le traitement des données, et le recours à des services distants de stockage et d’analyse de contenus. L’interconnexion de capteurs, de compteurs et d’objets aux caractéristiques différentes impose de développer des architectures intégrant de fortes contraintes d’adaptabilité, de sécurité et de latence. Elles devront garantir un temps de réponse acceptable pour les objets qui échangent des données avec le cloud, afin d’éviter les problèmes de congestion. C’est tout l’enjeu du Big Data.

Mais au-delà des aspects techniques de vitesse de calcul et d’accès aux données, l’Internet des Objets nécessite la mise en place de nouvelles règles pour la communication entre les objets. En effet, le potentiel réel de l’IoT ne sera atteint que lorsque les objets seront capables de communiquer entre eux, sans intervention humaine, tout en prenant les décisions pour lesquelles ils ont été programmés. Cette capacité repose sur des règles de priorité strictes et partagées par l’ensemble des acteurs. C’est tout l’enjeu de la standardisation et de l’interopérabilité que nous abordons plus en détail ultérieurement dans ce dossier.

L’Internet des Objets dans les réseaux électriques

Un technicien au LinkyLab – Crédit photo : Enedis

Pilotage des réseaux

Le pilotage des réseaux électriques est au cœur des enjeux de l’Internet des Objets liés à l’énergie. L’infrastructure actuelle est issue de vagues d’investissements datant d’il y a plusieurs décennies. Par conséquent, les systèmes informatiques qui la composent sont aussi issus du contexte technologique de l’époque. Les avancées technologiques permises par les moyens modernes nécessitent donc la mise à niveau de ces infrastructures. C’est tout l’objet de la norme ISO 61 850 qui propose une méthodologie de modernisation des stations électriques.

La norme 61 850 organise le passage de protocoles « master-slave » à des protocole « client-serveur ». Elle corrige les soucis d’interfaçage entre les différents types d’équipements et leurs protocoles propriétaires, ce qui constitue une avancée majeure en termes d’interopérabilité. Elle permet des économies de gestion opérationnelle mais donne aussi beaucoup plus de flexibilité aux gestionnaires de réseau en ouvrant la voie à des installations multi-propriétaires. La dynamique de la norme 61 850 s’inspire de la vague du « tout sur IP » qui a touché les réseaux d’entreprise il y a dix ans. Mais la norme 61 850 prend aussi en compte les contraintes métiers qui sont spécifiques au monde de l’énergie. Plusieurs démonstrateurs français, dont le Poste Intelligent, ont d’ailleurs mis en œuvre différents volets de cette norme en plein développement.

On estime qu’il y a environ 200 000 postes de transformation et 30 000 000 de postes sources dans le monde. Sachant qu’environ 10% de l’énergie électrique est perdue dans les réseaux du fait du manque ou de l’absence d’optimisation de l’ensemble des ressources, cela donne un potentiel marché prometteur.

Intégration des EnR

Les énergies renouvelables sont par nature intermittentes. Elles induisent de nouveaux aléas qui mettent en risque la stabilité des réseaux, ce qui induit la conception de nouvelles solutions. Les avancées du monde du numérique constituent en ce sens une réponse prometteuse pour le pilotage en temps réel et l’intégration des énergies renouvelables. Ces solutions d’un nouveau genre permettent l’émergence de différentes fonctionnalités allant du report de l’appel de puissance à la maîtrise du risque d’interruption de service.

L’enjeu se situe à la fois côté production, avec les solutions capables de prédire avec précision la production des énergies renouvelable. C’est par exemple ce que propose les sociétés comme Réuniwatt ou Leosphère au travers d’algorithmes de prévision mêlant information météorologiques, caractéristiques des parcs installés et données historiques. Au cœur de ces technologies, les capteurs et les systèmes de traitement de données massives rendent possible de nouvelles applications. Côté consommation, une meilleure connaissance des consommations d’énergie à une maille plus fine permettra demain de mieux prévoir les demandes des consommateurs. C’est, entre autres, une des avancées que pourrait apporter les courbes de charge individuelles issues des compteurs Linky, ou équivalents.

Comptage intelligent

Le compteur intelligent constitue le maillon le plus visible des Smart Grids pour le grand public. Demain, ces véritables objets connectés, en plus de fournir des informations de comptage, offriront de nouveaux services aux consommateurs. Il s’agit du maillon de transition entre l’abonné et le réseau électrique. C’est une interface privilégiée qui, une fois connectée pourrait offrir aux utilisateurs différentes fonctions comme les alertes temps réel ou l’étude des historiques de consommation.

En France, le déploiement des compteurs Linky a débuté depuis plus d’un an. Ils équiperont bientôt plus de 38 millions de foyers. A travers ces compteurs, ce sont la mise à disposition des données énergétiques aux consommateurs et la création d’un écosystème d’acteurs innovants qui seront rendus possibles.

D’après une enquête d’opinion menée par le comité de suivi du compteur Linky, seuls 0,7% des personnes possédant le nouveau compteur ont effectué une réclamation auprès d’Enedis, ce qui témoigne d’un taux de satisfaction très élevé de la part des utilisateurs. Enedis a indiqué le 13 mai 2016 aux acteurs des énergies renouvelables que le compteur communicant Linky sera compatible avec l’autoconsommation d’électricité à partir de janvier 2017.

Innovation

Au-delà de la gestion de la production et de la demande de l’énergie, il existe d’autres gisements d’innovation liés aux Smart Grids, notamment autour de thématiques annexes comme la maintenance, la formation, la sensibilisation ou le véhicule électrique. Enedis et Rte avaient organisé en 2015 deux concours d’innovation dans le but d’identifier des jeunes pousses françaises porteuses d’innovations de rupture sur ces sujets. Les résultats ont été au-delà des attentes des organisateurs.

Les cinqs lauréats du concours Enedis constituent de véritables exemples du potentiel de l’Internet des Objets pour les Smart Grids. La société Exem par exemple, commercialise des capteurs connectés de mesure des ondes électromagnétiques. Geokaps, acteur spécialisé dans l’étude des données issues des réseaux sociaux, propose une solution permettant la détection d’incidents sur le réseau électrique grâce aux informations récupérées sur les réseaux sociaux. Intesens, société basée à Toulouse, a mis au point une technologie de maintenance augmentée basée sur des capteurs connectés et une application mobile. DCBrain édite une solution d’intelligence artificielle basée sur les données énergétiques issues des capteurs comme le compteur Linky. Sirea a mis au point une solution en électricité et automatisme pour une meilleure conduite des réseaux.

L’Internet des Objets pour les consommateurs

IoT – Crédit photo : Code_n sur Flickr en CC

Vers la tarification dynamique au profit du réseau

Les capteurs implantés tout au long et en tous points des réseaux (des équipements de production décentralisés jusqu’au lieu de consommation) assurent toute une série de fonctions : la surveillance des équipements présents sur les réseaux de distribution, le pilotage des incidents, les opérations de comptage, les relevés de consommation à distance.  La société Intesens a par exemple conçu une plateforme de télédiagnostic industriel reposant sur des capteurs autonomes qui surveillent un équipement. Si un défaut est détecté, une alerte est envoyée au travers d’un réseau IoT. L’utilisateur est alors notifié en temps réel. Outre son réseau de capteurs miniatures et sans fil longue portée, l’entreprise toulousaine propose des architectures à très faible consommation d’énergie, une récupération d’énergie, un stockage embarqué de l’énergie et un accès aux données via une plateforme Web sécurisée.

En facilitant l’échange d’informations entre les besoins du réseau, le niveau des prix de l’électricité et le niveau de la consommation, les capteurs ouvrent la voie à une gestion active de la demande, en réponse à l’intégration des énergies renouvelables intermittentes et à la multiplication des nouveaux usages.

« Ces échanges permettront d’équilibrer le réseau avec plus d’efficacité par la connaissance des éléments calculés en temps réel comme les capacités d’effacement. En effet, les possibilités d’ajustement de consommation devront également être évaluées puis déclarées en temps réel aux responsables d’équilibre des réseaux de transport et de distribution, le marché prenant alors la forme d’un marché d’options sur le mode de fonctionnement du mécanisme d’ajustement actuel », selon la CRE.

Cette visibilité du coût instantané de l’électricité permet de modéliser de manière très fine le comportement des usagers, d’extrapoler des demandes futures, de mieux adapter l’offre à la demande.

Les capteurs implantés sur les équipements présents sur les réseaux de distribution (lignes aériennes, câbles souterrains, postes de transformation, etc.) permettent de surveiller l’utilisation des équipements et d’anticiper leur défaillance (par exemple sur les pièces d’usure) et ainsi de prévoir leur fonctionnement futur. La remontée des données du réseau au niveau des systèmes d’information centraux permet de faire émerger des schémas types de pannes et ainsi de prendre de manière très réactive des décisions d’autocorrection, voire d’auto-cicatrisation (dans les minutes, voire les secondes, pour éviter la propagation de la panne sur le réseau).

Maison connectée

Les innovations de l’Internet des Objets sont également légions autour du thème de la maison connectée. Si les consommateurs se sont jusqu’à maintenant concentrés sur les équipements multimédia pour leur domicile (TV, Blue-Ray, Box multimédia, …), il se pourrait que la prochaine révolution vienne du monde de l’énergie.

EDF a récemment lancé en ce sens l’offre Sowee, permettant aux consommateurs de disposer à leur domicile d’une station connectée répondant à l’ensemble de leurs besoins de confort, dont l’énergie est la composante principale. Mais la société ne fait pas figure de pionnier dans le domaine, DeltaDore, Somfy, Ijenko ou encore Vity, proposent depuis plusieurs années des solutions complètes autour de la maison et de la gestion intelligente de son énergie.

D’autres solutions existent, comme celle proposée par la société e-green qui propose aux particuliers et aux bailleurs sociaux de mettre en place un réseau social permettant de lancer des défis énergétiques à ses amis ou voisins, les incitant ainsi à réaliser des économies d’énergies au travers d’une approche ludique. La solution repose sur des capteurs installés chez les particuliers sur leurs sources de consommations. Les informations de ces capteurs sont ensuite récupérées et traitées au travers de l’Internet des Objets.

Chauffage intelligent

Le chauffage constitue la part la plus importante de la consommation des ménages, représentant environ 67 % du total des dépenses énergétiques. En 2013, la facture de chauffage moyenne d’un ménage était en France de 1 660 €. Certains acteurs des Smart Grids l’ont bien compris et proposent des solutions de thermostats connectés qui permettent à leurs détenteurs de réaliser des économies substantielles. Contrairement à de nombreux usages énergétiques, le pilotage du chauffage confère également à ses utilisateurs un gain de confort, ce qui fait des thermostats connectés un des produits les plus plébiscités par les consommateurs.

Schneider Electric avait lancé en 2012, en partenariat avec le designer français Mathieu Lehanneur, une offre similaire : Wiser. Au travers de plusieurs modules, la solution offre la possibilité de mieux contrôler son chauffage via une application mobile. Mais le fameux groupe isérois n’est pas le seul à proposer ce genre de solutions puisque la startup nantaise Qivivo en a fait sa spécialité et que NetAtmo, le spécialiste des objets connectés, propose également un modèle de thermostat dessiné par le designer Philippe Starck.

Electroménager intelligent

Au-delà du chauffage, l’électroménager est une source significative de consommation énergétique puisqu’il représente environ 22% des consommations d’un foyer. Sur ce sujet également, les acteurs des Smart Grids sont mobilisés. Demain, nos appareils électroménagers seront capables d’interagir avec le réseau pour, selon les besoins, décaler leur démarrage, décaler la réalisation d’une des phases d’un programme (lavage, pré-lavage, essorage, séchage, …) ou automatiquement programmer un démarrage à une heure optimale. Ce pilotage intelligent permettra de faire bénéficier l’ensemble du réseau d’une nouvelle source de flexibilité et donc d’accroître sa capacité à intégrer les énergies renouvelables et intermittentes.

Afin de réaliser les fonctions décrites précédemment, il est cependant nécessaire que l’ensemble de nos appareils communiquent à l’aide d’un langage commun. C’est d’ailleurs ce que plusieurs initiatives de standardisation tentent de rendre possible. La Commission Européenne a lancé une ontologie de référence à ce sujet appelée SAREF (pour Smart Appliances REFerence ontology). Cette initiative a maintenant été reprise par plusieurs autres structures de référence du monde de la standardisation comme le TC One M2M de l’ETSI et le TC 59x de l’IEC.

Les enjeux de l’Internet des Objets pour l’énergie

Des standards pour des technologies interopérables

Comme il a déjà été mentionné à plusieurs reprises dans ce dossier, des technologies standardisées et interopérables favoriseraient une meilleure diffusion des usages liés à l’Internet des Objets. Plusieurs travaux sont actuellement menés à cette fin.

Huit organismes historiques de standardisation, dont l’ETSI (UE) et l’ATIS (US), se sont regroupés au sein de la plus grande initiative de standardisation de l’Internet des Objets : OneM2M. La structure a publié en août 2016 la V2.0 de ses spécifications. Elle vise à standardiser l’ensemble des échanges informatiques de tous les domaines liés à l’Internet des Objets : santé, domotique, industrie, énergie, … La structures rassemble plus de 200 partenaires industriels qui apportent leurs ressources et expertises.

Si l’essentiel des acteurs s’accordent sur la pertinence d’une telle approche, certains doutent qu’elle suffira à standardiser l’ensemble de l’Internet des Objets. Selon certains d’entre eux, la conception des cas d’usages de référence ne pourra venir d’une approche centralisée issue des structures classiques de standardisation. Elle se fera au contraire, au gré des évolutions du marché et de manière ponctuelle et bottom-up. C’est tout ce que la Allseen Alliance, lancée par Microsoft et Qualcomm, l’Open Interconnect Consortium, de Samsung et Intel, ou Google Weave, souhaitent à leur manière accompagner. Au lieu de proposer une ontologie complète et exhaustive, ces structures proposent des frameworks permettant à leurs communautés de développeurs de directement mettre au point leurs applications. Laissant par la suite au marché et aux consommateurs le soin d’en valider ou non la pertinence.

Dans l’ère de l’IoT, la cybersécurité des réseaux devient un enjeu crucial

L’avènement de l’Internet des Objets exige un besoin accru en cybersécurité. Selon la CRE, « l’augmentation du nombre de points d’interaction avec le réseau expose potentiellement les réseaux électriques intelligents aux menaces modernes ciblant les systèmes d’information ». Divers facteurs sont directement mis en cause : « l’absence de prise en compte de la sécurité lors des phases de conception […] ; le risque d’obsolescence face aux rapides évolutions technologiques […] ; l’absence de normes applicables et suivies en matière de sécurité et de confidentialité […] ; ou l’acheminement, le stockage et la gestion d’un volume exponentiel de données ».

A titre d’exemple, « les compteurs communicants doivent avoir la même durée de vie que les compteurs mécaniques, mais doivent également pouvoir démontrer une solide résistance aux attaques, pouvoir être mis à jour à distance et se voir facilement appliquer des patchs de sécurité pour corriger les bugs ou prévenir des menaces et sécuriser des données des usagers ».

EDF R&D et Telecom ParisTech ont créé un Laboratoire Commun de Recherche, dénommé « Laboratoire SEIDO », sur l’Internet des Objets et la cybersécurité pour les systèmes électriques dans le but de travailler sur le sujet.

ITEMS International pour Think Smartgrids